Décoloniser « nos migrants »

Stop ! Il est plus qu’urgent de stopper l’usage sans (forte) conscience du terme « migrants ».

Plus que temps de dépoussiérer ce terme attribué sans réelle perception de sa (forte) discrimination de l’un (média, politique, acteur social, sociologue, anthropologue) à l’égard des autres auxquels se voit donner une autre nomination, une « autre identité » décidée, imposée par autrui : « les migrants ».

Que sous-tend cette forme de colonisation ? Sans doute un jeu de pouvoir devenu inapproprié et, a minimum, à radicalement questionner.

Quel est ce territoire « les migrants » que dessine une colonisation politique au design associé avec « les frontières » ?

Qui oserait encore vouloir fermer les yeux sur cet abus de langage aux accents bien ténébreux qui enclot, alors que nos migrations sont nos mouvements et ouvertures, sens de nos vies ?

Qui, au soir de l’histoire, regardera avec justesse cette époque, ce temps, où certains auront marqué d’autres du fer de « migrants » ?

Non ! Il n’est pas possible de continuer, au nom de quelque dite légitimité, bien orgueilleuse, à sectariser, à diviser nos humanités, nos vies.

Oui ! Nos migrations sont à tous et à chacun : de l’ordre d’une source à nos vies. Etre-vivant car être-migrant.

Nous sommes tous des descendants des premiers migrant.

Décoloniser « nos migrants » est évidemment un titre provocateur qui renvoie à « nos esclaves », par exemple.

Il s’agit donc de se désolidariser d’une solidarité (utile ?) qui enferme et objectivise des êtres-humains au nom qu’ils seraient « des migrants ».

Oui ! Nos transitions sont l’œuvre de nos migrations ; sans un autre regard sur nos migrations (temporelles, physiques, spatiales, visibles, invisibles, intellectuelles, spirituelles…), rien ne pourra se déployer pleinement.

Il ne s’agit pas ici d’encourager un renversement épistémologique (qui serait à nouveau décidé par quelques-uns du haut de leur chaire) mais bien d’honorer nos migrations en tant qu'êtres vivants. Nos migrations sont au croisement de nos réalités et de l’inscription d’un Réel qu’est la Vie en son chemin et, en quelque sorte, en ses vérités.

Réinventons nos migrations, libérons-les des chaînes dans lesquelles certains (bien-pensant et donc bien-migrant) les ont enchaînés.

Nos conditions d’êtres vivants habiteront alors pleinement leurs migrations.

Ensemble, migrant