Pauvre de moi…

C’est l’expression un peu surannée qui m’est venue à l’esprit au cours du concert de musique donné par trois personnes réfugiées à la Maison Josefa

Pendant une heure, je me suis laissé porter par des sonorités exotiques prenantes, presque lancinantes, qui appellent à l’intériorité, produites par trois instruments : oud, violon et tambour, parfois accompagnés vocalement.

A partir de là, ma réflexion s’est élargie et a voyagé vers l’horizon plus large des mouvements migratoires que nous vivons difficilement en Europe et contre lesquels une majorité de gouvernements et de populations se mobilisent. C’est là que je me suis dit : « pauvre de moi, pauvres de nous… », c'est-à-dire, « comme nous sommes à plaindre ». Sûrs de notre riche patrimoine culturel et de notre histoire, trop souvent, nous fermons nos frontières, nous élevons des murs, nous dressons des clôtures, nous nous enfermons dans notre suffisance, pour nous défendre d’« envahisseurs » redoutés auxquels nous prêtons même parfois des intentions belliqueuses.

Aveugles et sourds, nous ne savons pas reconnaître ce que nous apportent les personnes réfugiées qui ont souvent risqué leur vie pour arriver jusque chez nous et qui demandent l’hospitalité, c'est-à-dire, de leur faire une place et de partager nos richesses respectives : musique, chants et cinéma, gastronomie et cuisine, santé et médecine, techniques et savoir-faire divers, langues, littérature, poésie..., nous avons tant de choses à échanger. Malheureusement, pour un grand nombre d’entre nous, murés dans notre narcissisme occidental et accrochés à une nostalgie morbide, coupés de notre futur, nous prenons le risque de passer à côté.

Pour celles et ceux qui ne l’ont pas encore ressenti et expérimenté, puissions-nous découvrir que, nous aussi, même sédentaires et sans quitter notre pays, nous sommes migrants, ou réfugiés, par exemple au travers de l’histoire de nos aïeux, c'est-à-dire en déplacement permanent, et que notre intérêt commun, individuel et collectif, est dans la diversité des rencontres, à la condition que nous reconnaissions notre histoire commune de migrants.

Jean-Louis